Conseils pour être recruté

 

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Le recruteur est anxieux et paresseux. Anxieux, parce qu’une erreur de recrutement peut coûter très cher humainement et financièrement. Paresseux, parce qu’il rêve que le candidat se montre comme le titulaire parfait du poste à pourvoir, sa décision serait simple. Le candidat ne doit pas lui en vouloir, mais plutôt le comprendre.

Il est certain que le candidat ne peut pas apporter au recruteur ce qu’il n’a pas. Mais il peut aussi échouer à apporter quelque-chose qu’il avait, qui aurait rassuré le recruteur et facilité sa décision de le recruter. C’est ici que l’Art Oratoire du candidat est essentiel.

Dans la perspective de l’entretien, le candidat a tendance à préparer une histoire bien ficelée, montrant ses qualités requises pour le poste et une motivation à toute épreuve. Son trac le conduit à réciter un texte sur-préparé qui veut tout dire, et finalement ne dit rien, si ce n’est sa peur de ne pas être « pris ».

Sauf à découvrir en cours d’entretien que le poste finalement ne lui convient pas, le candidat entre dans l’entretien pour être recruté. C’est son port d’arrivée. Mais il ne doit pas avoir prévu la route verbale, tonale, et rythmique, pour y arriver. Elle lui sera inspirée  par le recruteur durant l’entretien. Ses préoccupations, son humeur et sa façon de faire son métier, sont imprévisibles pour le candidat. En s’y adaptant, il tracera sa route.

Il doit avoir confiance dans le partenariat physique de son recruteur. Même et surtout pendant qu’il parle. Son regard doit donc s’intéresser continument à lui. Lorsqu’il a un doute sur le choix d’un mot ou d’un argument, qu’il conserve son regard d’intérêt pour le recruteur, et qu’il attende avec lui que son cerveau ait tranché sur la route à suivre. Le temps cérébral est un temps réel. Le recruteur peut le comprendre dès lors que le candidat attend avec lui qu’il s’écoule. Alors, ce que décidera le cerveau du candidat sera toujours en phase avec ce que cherchait le recruteur.

L’intérêt décidé du candidat pour son recruteur doit le conduire à l’accueillir dans son regard, et non pas à le vriller du regard. Cela conduira le candidat à se redresser. Quand on aperçoit au loin  quelqu’un qui nous intéresse, on se redresse. Certes, le recruteur n’est pas physiquement loin du candidat, mais il l’est psychologiquement. C’est toujours un éloignement.

Le corps redressé du candidat propose au recruteur une forme nette, qui n’est autre que sa personne transfigurée en personnage, en l’occurrence celui du titulaire parfait du poste à pourvoir. Que le candidat se préoccupe alors de vocaliser correctement ce qu’il dit, puisque son corps redressé prépare sa colonne d’air. Il fera entendre au recruteur, toujours de façon adaptée à ce qu’il cherche, la qualité de son investissement dans le discours. Le candidat aura ainsi apporté au recruteur quelque-chose qu’il avait en lui, et que le recruteur recherchait. Quelque chose qui le sécurise, et flatte sa paresse. Comme pourrait-il ne pas recruter ce candidat ?

Le candidat ne doit pas, par peur, construire l’entretien à l’avance. Il doit attendre de le co-construire avec le recruteur. Le partenariat physique qu’il lui propose à cet effet, par son regard, sa posture, et sa voix, est toujours accepté. Il crée entre candidat et recruteur un authentique partenariat intellectuel. Si le recrutement finalement ne se fait pas (un autre candidat aussi crédible l’a emporté, il fallait bien choisir), les deux ne regrettent pas leur rencontre. Leur partenariat s’est noué, un jour il trouvera son utilité.